« Définition de fini » en production musicale
Il s’agit d’un scénario courant qui implique que quelqu’un doute de l’état d’avancement de sa chanson, principalement pour savoir si elle est terminée. Vous êtes peut-être cette personne. Vous avez l’impression que votre chanson est terminée, vous l’exportez, vous l’écoutez dans la voiture ou avec des amis et puis vous sentez cette vague de malaise qui vous envahit parce que vous remarquez toutes les erreurs et les choses qui ne vont pas. Laissez-moi vous rassurer : vous n’êtes pas seul et cette situation est plus fréquente que vous ne le pensez.
Le concept de définition de fini (Definition of Done, DoD en anglais) est un concept que j’ai emprunté au processus Agile, qui est typique des codeurs ayant affaire à un scrum master, principalement dans la gestion de projet. En Agile, il y a des sprints où un objectif est fixé, puis des tâches/actions sont entreprises pour atteindre un certain point. Ils conviennent que la tâche est terminée lorsqu’un certain nombre de critères sont remplis. Cela peut s’appliquer à n’importe quel projet, du désherbage de votre jardin à la préparation d’un repas.
Dans un monde qui n’est pas celui du monde numérique, avec des 1 et des 0, le concept de « fini » peut être un peu délicat, car le niveau de maîtrise peut changer selon la personne qui établit la définition de fini. En d’autres termes, vous pourriez convenir que ma définition de fini sur une chanson sera très différente de celle d’une personne novice en musique. Et ce n’est pas grave.
Il existe quelques concepts que nous pouvons examiner et qui vous aideront à vous défaire des murmures de votre voix intérieure.
Une chanson n’est jamais vraiment terminée
Celle-là fait mal, hein? Mais je vous le dis, il n’y aura jamais un domaine où l’incertitude peut vous frapper plus que la musique, principalement parce que les choses sont abstraites dans le monde des sons. Votre principal ennemi est vraiment vous-même et le jugement que vous portez sur ce que vous faites change tous les jours, parfois même en une journée. Vous ne le saurez jamais vraiment, honnêtement, mais il y a certaines choses qui peuvent vous aider. Je ne m’adresse pas à vous pour vous dire de laisser tomber. Ce qui m’intéresse, c’est de savoir jusqu’à quel point je peux vivre avec des imperfections et jusqu’à quel point une personne au hasard les remarquera. C’est là que ça compte.
Il y a un certain nombre de choses que nous ne savons pas et il y a aussi une zone grise de choses que nous ne savons même pas que nous ne savons pas. Votre chanson se situe entre les deux et votre futur moi, dans 10 ans, comprendra avec plus de compassion que cette chanson a été réalisée dans les limites techniques du moment. Et c’est vraiment bien, croyez-moi.
Les références révèlent la vérité
C’est là que beaucoup de gens échouent. Vous ne pouvez pas savoir que vous avez terminé si vous n’avez pas de modèle. Par exemple, vous pouvez cuisiner une pizza, mais honnêtement, si vous n’en avez jamais mangé (je vous plains!), il est assez difficile de la comparer à quoi que ce soit. J’ai mangé l’une des meilleures pizzas de ma vie à New York et ce goût s’est forgé comme mon préféré. Chaque fois que je mange une pizza maintenant, que ce soit à l’aéroport ou dans un petit restaurant, mon esprit la compare à celle que j’ai mangée à New York. C’est la même chose avec le son. Lorsque je fais du mastering ou du mixage, j’ai des modèles d’autres projets et je sais exactement comment je veux que ça sonne.
Pour les arrangements, ce qui est facile, c’est de charger un morceau dans Ableton ou dans votre DAW et de s’en servir comme d’un moule. J’encourage les gens à faire une écoute critique, à compter combien de sons ils entendent dans la référence et à la comparer à la leur. Très souvent, les gens ont beaucoup trop de choses qui se produisent en même temps ou peut-être qu’il y a un élément de moins — et cela aide beaucoup. Même chose pour les niveaux, dans le mixage.
Mais je veux sonner de manière unique… je vous entends dire. Bien sûr, vous y arriverez, mais vous devez d’abord acquérir de solides compétences en matière de finition des chansons.
Encore une fois, la plupart du temps, quand quelqu’un n’arrive pas à déterminer s’il a terminé ou non, je lui demande d’abord « comparé à quoi? ». Principalement parce que si on ne compare pas avec quoi que ce soit, on se sent juste arbitraire dans la décision et c’est pourquoi vous aurez l’impression de dire oui ou non, selon votre humeur et votre niveau d’insécurité.
Enfin, faites attention à ne pas vous comparer à un fichier masterisé. Vous risquez de vous mettre en situation d’échec si vous vous comparez à une chanson qui a été faite par un musicien qui a plus d’expérience que vous, qui a sorti beaucoup de musique et aussi, si la chanson est masterisée et que la vôtre ne l’est pas, eh bien, ce ne sera pas égal. Vérifier les volumes (par exemple, snare ou kick), ainsi que d’autres détails, donne lieu à un combat plus équitable.
Demandez une rétroaction
Il existe de multiples façons de demander une rétroaction et de nombreux endroits pour le faire également. Vous pouvez en obtenir gratuitement dans mon groupe Facebook (quand je suis libre) ou par le biais de mon programme Patreon. Vous pouvez demander à d’autres producteurs, même s’ils ne sont pas très expérimentés, mais assurez-vous qu’ils écoutent dans le bon état d’esprit, ou dans le bon contexte (certains écoutent sur leur téléphone, non!).
Faites des pauses et prenez du recul
Cela a été dit à maintes reprises sur ce blogue, mais les sessions de studio de plus d’une heure peuvent vous conduire à vous tromper sur ce que vous faites. Vous pouvez penser que c’est génial ou nul, peut-être que ce n’est ni l’un ni l’autre parce que votre jugement, honnêtement, s’arrête après 1 h de travail. Cela s’appelle la fatigue décisionnelle et vous en avez peut-être déjà fait l’expérience.
Je fais des sessions de 1 h max, mais de préférence de 20 minutes à la fois, avec des pauses. Je laisse mes morceaux dormir pendant des semaines ou des mois. Quand je les rouvre, je veux les avoir suffisamment oubliées pour avoir l’impression d’écouter la chanson de quelqu’un d’autre et on sait tous à quel point on est bon critique quand ce n’est pas la nôtre. Je crée des projets et les retravaille souvent 3 ou 4 ans plus tard. C’est vraiment amusant et finalement, quand vous créez ces sessions, vous en avez un paquet et vous redécouvrez toujours des pépites dormantes.
Lorsque j’ai une très bonne idée et que je sens que ce serait vraiment bien, je m’arrête généralement là et JE NE TRAVAILLE PAS DESSUS! Je la laisse dormir pendant des mois. Surtout parce que ce que je pense être une idée géniale peut ne pas en être une et si c’est le cas, je veux que ce soit mon futur moi qui s’en occupe. D’ici là, j’aurai réfléchi, accumulé de nouvelles idées, acquis de nouveaux plug-ins et de l’expérience, de sorte que lorsque j’ouvrirai ce joyau endormi, j’aurai tout ce qu’il faut pour le transformer en ce que je veux. Parfois, je travaille sur une super chanson et il me manque peut-être quelque chose, alors je peux aussi saisir cette idée et la transformer en une bombe presque finie, qui sera certainement au-delà de ce que j’attendais.
Décidez quand vous vous sentez bien
Cette question peut être déroutante ou tellement évidente que vous pouvez vous sentir pris au dépourvu. Pensez à la dernière fois que vous avez vu l’un de vos amis sur son fil d’actualité Facebook dire qu’il avait abandonné sa carrière de DJ ou quelque chose comme ça… eh bien, en fait, il prend une décision quand il se sent mal. Si vous décidez d’abandonner, vous avez accumulé de la frustration. C’est la même chose pour vos projets. Comme le suggère la recommandation précédente, faire des pauses et attendre avant de prendre une décision est tout à fait sain et vous permet d’attendre le moment où vous vous sentez vraiment bien dans votre chanson. Surtout si vous avez l’impression que la moitié du temps où vous l’écoutez, c’est bon pour la poubelle. Dans le doute, la plupart du temps, les pauses sont cruciales. Si 90 % du temps vous avez le sentiment que quelque chose a besoin d’être corrigé, alors faites-le.
Comment établir votre définition de fini :
Maintenant que nous avons abordé les stratégies permettant de savoir si votre chanson est terminée, examinons comment établir votre propre définition du terme « fini ».
1- Choisissez une référence (ou plusieurs), comme nous l’avons vu précédemment. Il s’agit de donner le ton, l’esthétique, la direction. Décidez et engagez-vous sur ce que sera cette chanson (une ballade? un drone ambiant? une bombe pour le dancefloor?) puis trouvez quelque chose de solide qui vous servira de référence. Vous vous y référerez.
2- Analysez votre référence et sachez quelles sont les exigences minimales. Comprenez à l’avance ce que vous ne pouvez pas faire à partir de celle-ci et ce que vous pouvez contrôler. Demandez de l’aide, consultez des tutoriels et faites le maximum.
3- Décidez à l’avance ce que vous allez faire et ce que vous ne pouvez pas faire. Si vous vous connaissez et que vous connaissez les parties où les choses sont un peu plus difficiles, vous pouvez toujours demander de l’aide. Il y a cette idée fausse que l’on devrait être capable de tout faire soi-même, mais c’est contre-productif. Voulez-vous être moyen dans tous les aspects de la production? L’idéal est de s’amuser d’abord et de s’améliorer, mais vous pouvez aussi demander de l’aide : des amis, d’autres producteurs, moi-même.
4- Fixez-vous un plan. Vous pouvez vous fixer une échéance, mais aussi des zones de non-actions à entreprendre.
5- Définissez quelques points de ce que seraient certains objectifs de « fini ». Il peut s’agir de l’étendue du mixage que vous voulez faire (ex. je vais passer 2 h maximum au mixage). Ou « Je veux que ma batterie soit très punchy » comme un objectif à atteindre. Peut-être que votre chanson ne sera jamais aussi punchy que ce dont vous rêvez, mais lorsque vous demandez un retour à quelqu’un qui ne l’a jamais entendue, vous pouvez lui demander s’il pense qu’elle a du punch. Si vous demandez un avis général et vague, vous obtiendrez des réponses vagues.
6- Testez en contexte. Jouez votre morceau dans un mix de DJ ou demandez à un ami DJ de le jouer. Voyez ce qui se passe, comment il sonne par rapport aux autres morceaux. Ce seul fait peut révéler de nombreux défauts et points forts. J’aime aussi glisser une référence dans mon DAW et jouer mon morceau avec un autre, les mixer ensemble, pour que je puisse voir si cela fonctionne avec les arrangements.
Conclusion
Cette approche a prouvé à de nombreuses reprises avec des clients qu’elle fonctionne. Plus vous êtes préparé, mieux c’est. Devez-vous toujours faire cela? Non. Je le fais surtout lorsque j’ai des périodes où je manque d’inspiration ou lorsque je suis engagé pour un contrat plus important. Mais c’est bien de le mettre en pratique ici et là, de sorte que lorsque vous êtes confronté à des défis, vous ne vous lancez pas là-dedans sans avertissement. Cela pourrait en fait se retourner contre vous.
Photo par Brett Jordan sur Unsplash
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !